Nous sommes tous agiles par nature
Ce point de vue, écrit en 2018 devait servir dans une communication d’entreprise. Je l’ai repris et un peu adapté pour être publié ici. Il est toujours d’actualité.
Au cours de notre vie, nous ne cessons de nous adapter à un environnement extrêmement changeant et inconnu. Sans nous en rendre compte, nous faisons preuve d’agilité à chaque instant.
L’agilité c’est la vie
Imaginez, vous vous rendez chez vos amis ce soir. Vous prenez votre véhicule pour vous y rendre. Vous connaissez le chemin et comptez réaliser le chemin en 34 minutes. C’est le temps que vous mettez d’habitude.
Et là, pas de chance vous tombez en plein bouchon : un accident à 300m, la route est bouchée, vous roulez au pas.
Vous vous rendez compte qu’il y a des rues adjacentes, elles ont l’air moins chargées ouf ! bonne décision vous limitez votre retard chez vos amis.
A quelques encablures, vous sentez que quelque chose n’est pas normal. Vous avez oubliez chez vous le bouquet de fleurs que vous vouliez offrir à vos amis !! Plusieurs possibilités s’offrent à vous : retourner chez vous (gloups les bouchons), ou trouver un fleuriste ouvert dans le coin. Un coup de recherche géolocalisée et hop un fleuriste pas trop loin qui ne vous fait pas perdre trop de temps.
Finalement vous arrivez chez vos amis avec votre présent, vous remarquez le retard que vous n’aviez pas prévu. Vous vous dites que les prochaines fois vous partirez un peu plus tôt afin de prendre en compte ces aléas.
Autre exemple – un objectif à bien plus long terme – celui d’élever un enfant. Évidemment les enfants ne sont jamais livrés avec un mode d’emploi : qui peut dire qu’il savait à l’avance comment élever son enfant et ce qu’il va devenir à l’âge de 20 ans ?
En tant que parents nous nous efforçons de fournir le meilleur cadre possible, faire les meilleurs choix possibles et nous savons aussi que nous faisons des erreurs. C’est inévitable.
Nous ne pouvons pas prédire l’avenir, alors nous expérimentons.
Nous faisons des hypothèses, nous prenons des décisions et avançons à petits pas, en réajustant en permanence nos comportements pour atteindre nos objectifs de vie. Nous apprenons de façon empirique.
Par nature, nous sommes tous agiles.
A l’origine, pour le développement logiciel
C’est cela l’agilité : expérimenter, apprendre en continu, s’adapter.
D’ailleurs, le Manifeste agile et les mouvements plus récents comme Heart of Agile, Agnostic Agile ou Modern Agile ne disent pas autre chose.
Rédigé Outre-Atlantique en 2001, par un collectif de 17 experts des systèmes informatiques, le Manifeste Agile explique que ses auteurs ont découvert que certaines choses marchaient mieux que d’autres en observant comment ils développaient et comment ils aident les autres à développer : empirisme, collaboration, pragmatisme avant tout.
Lorsqu’il est appliqué au développement logiciel, l’agilité s’associe fortement à la satisfaction des utilisateurs et clients des logiciels, à la notion d’apport de valeur, à la collaboration au-delà des silos des entreprises et à la qualité logiciel.
En conséquence de cela, l’agilité nous force à une compréhension différente d’un développement logiciel :
- Nous cherchons à obtenir un bénéfice que l’on peut mesurer plutôt que d’obtenir un ensemble de fonctionnalités.
- Nous acceptons que les seules personnes qui peuvent savoir si le logiciel est adapté sont ceux qui l’utilisent. Nous acceptons qu’il nous faut obtenir ce feedback régulièrement via des périodes de temps courtes, des itérations.
- Nous comprenons aussi qu’à partir d’un objectif clairement défini, les meilleures personnes pour prendre des décisions pour construire un logiciel sont ceux qui le font.
- Et enfin nous comprenons qu’il est illusoire de prévoir ce qui se passera dans le futur au-delà d’un ou deux mois : ce sera faux, acceptons-le.
Ces quatre points peuvent facilement être calqués à d’autres domaines que le logiciel vous ne trouvez pas ?
Et l’agilité en entreprise alors ?
L’agilité, c’est avant tout un état d’esprit qui autorise plutôt qu’il n’interdit, qui va ensuite s’associer à un ensemble de pratiques qui vont permettre d’avancer et de progresser sur des bases solides.
Et si nous sommes agiles au quotidien, une fois que nous sommes au bureau, étrangement, nous oublions d’être agiles. Ou plutôt, nous étouffons cet instinct, pour nous conformer aux process imposés par l’entreprise. Nous acceptons des contraintes très importantes, en termes d’organisation notamment, qui vont à l’encontre de ce que nous dit la vie.
Les entreprises sont figées ; et bien sûr, elles ne se sclérosent pas par plaisir, mais par crainte, par prudence, pour tenter de réduire des risques.
On bloque les process qui fonctionnent à peu près, pour se rassurer ; et pourtant le monde est de plus en plus réactif, connecté, incertain. Nous, en tant qu’espèce humaine, sommes toujours vivants grâce à notre capacité d’adaptation. Si l’entreprise ne s’adapte pas mieux, et plus vite, elle mourra en essayant de se protéger.
Vers des organisations vivantes
A tous les niveaux, la vie c’est l’adaptation, le mouvement et aussi l’acceptation d’une fragilité.
Notre corps est constitué d’un amas de cellules qui ont décidé aux cours des millénaires que l’organisation adaptée à aujourd’hui est celle que nous connaissons. Chacune d’elles a besoin des autres cellules pour survivre à son écosystème et elles s’entre-aident dans ce but. Certaines meurent, certaines vivent, certaines s’adaptent dans un seul but : la survie du corps sans quoi toutes les cellules meurent.
Les entreprises ne sont pas différentes : ce sont des organisations qui cherche à survivre à leur écosystème. Actuellement nous pensons que la meilleure organisation est hiérarchique, avec un processus de décisions top-down.
Et ça ne marche plus.
Il est temps de voir les organisations comme des choses vivantes, dont les décisions sont prises au niveau le plus opérationnelle possible et qui participent à un but commun et connu de tous.
Ces nouvelles organisations qui sont nativement de cette nature sont déjà en train de pousser et de grandir.
Elles vous concurrenceront bientôt, puis feront mourir votre propre organisation.
Posez-vous ces questions : quel est le but de votre organisation ? Est-il connu et partagé de tous ? Est-ce que les décisions que vous prenez ou que vos managers prennent sont intentionnellement orientées pour atteindre ce but ?